Desjardins
Cartulaire de Conques

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Introduction.

Conques est un chef-lieu de canton du département de l’Aveyron, situé à 39 kilomètres nord-ouest de Rodez, sur les confins des anciennes provinces de Rouergue, de Quercy et d’Auvergne. Le chemin qui y conduit traverse un pays accidenté et pittoresque. Apres avoir longé le Crénau, qui baigne le pied du village de Salles-la-Source, célèbre par ses cascades, et arrose le vallon de Marcillac, on rencontre, entre Combret et Nauviale, une rivière dont les eaux rougeâtres descendent vers le Lot. Cest le Dourdou, que les auteurs du Gallia Christiana ont pris à tort pour la Dordogne1. Au bout de la plaine de Saint-Cyprien, se dresse une muraille de rochers qu’il franchit par une porte étroite, pour s’engager, rapide et bruyant, dans des gorges resserrées d’un aspect sinistre. A une lieue de là, les rochers s’entr’ouvrent, à droite, afin de livrer passage à un torrent2. Leurs parois écartées forment un immense trou, ressemblant assez à une conque. Dans cet espace est suspendue, à mi-côte, une plateforme, à laquelle on /ij/ grimpe par une pente presque verticale. C’est là que s’élevait l’abbaye bénédictine de Sainte-Foi de Conques.

Du monastère, il ne subsiste que quelques débris. Mais l’église est debout, à peu près intacte. Cest un beau monument de style roman languedocien, bâti dans la seconde moitié du xie siècle1. Il se compose d’une nef triple de longueur médiocre, d’un chœur et d’une abside dont les proportions sont remarquables. Dans le tympan de la porte d’entrée est sculpté un grand bas-relief, admirablement conservé, qui représente le jugement dernier. Une armoire, pratiquée, au xvie siècle, dans un entre-colonnement derrière le maître-autel, contient de nombreux et antiques reliquaires en or et en argent, couverts de pierres précieuses. Récemment on en a découvert plusieurs autres sous le maître-autel lui-même2.

Fondé au temps de Charlemagne, le monastère de Conques a eu pendant le Moyen-Age une splendeur, attestée par ces témoins. Ses possessions s’étendaient au loin dans plusieurs diocèses de France, en Angleterre, en Italie, en Espagne. Mais la décadence paraît avoir commencé de bonne heure pour lui. Dès le xiiie siècle on voit la mense conventuelle diminuer au profit de la mense abbatiale; on en peut conclure que le nombre des moines allait décroissant. En 1424, il n’était dejà plus que de 293. D’un autre côté, les prieurés éloignés se détachèrent peu à peu de la métropole et se laissèrent absorber par les puissances ecclésiastiques ou féodales qui les entouraient4. L’abbaye fut transformée en chapitre séculier sous François Ier. L’abbé seul /iij/ conserva jusqu’en 1790 sa grande situation. Bosc1 nous rapporte que lorsqu’il se rendait aux Etats du Rouergue, où il siégeait au troisième rang, « il se faisait escorter par une garde de cent et quelquefois de quatre ou cinq cents hommes de ses terres. »

Le chartrier d’un pareil établissement devait être d’une grande richesse. La Révolution l’a détruit ou dispersé. Ce qu’on en a retrouvé est réparti entre les archives de l’Aveyron et celles de la Société des lettres, sciences et arts de ce département. On y remarque des bulles, un diplôme de Pépin d’Aquitaine, un cartulaire, composé dans les premières années du xiie siècle, quelques chartes et une partie des pièces d’un procès du xvie s. entre l’abbaye et l’évêque de Rodez. Il faut y joindre deux volumes de la collection Doat2, dout le second surtout est intéressant parce qu’il contient des transcriptions de titres, compris entre le xie et le xviesiècle, malheureusement trop incomplètes pour permettre d’établir la suite des abbés. Avant d’étudier le cartulaire, qui est l’objet de la présente publication, il est nécessaire de dire quelques mots des commencements de l’abbaye et des faits les plus saillants de son histoire.

Torna su ↑

[Note a pag. j]

1. T. I, p. 286 et 237. Torna al testo ↑

2. La Louche Torna al testo ↑

[Note a pag. ij]

1. Mérimée a décrit l’église de Conques dans les Notes d’un voyage en Auvergne et en Limousin. Paris, 1838, in-8o. Torna al testo ↑

2. Le trésor, moins les pièces cachées dans le coffre du maître-autel, a été décrit dans un travail accompagné de planches, par M. Darcel, Annales archéologiques, t. XVI, XX et XXI. Torna al testo ↑

3. Bibliothèque nationale. Collection Doat 144. Torna al testo ↑

4. On trouve dans Doat 144, fo 137, une bulle de 1387, intimant aux archevêques, évéques, prélats, ducs, marquis, comtes, barons, communes, etc., de rendre les biens qu’ils avaient usurpés sur l’abbaye de Conques. Torna al testo ↑

[Note a pag. iij]

1. Mémoires pour servir à l’histoire du Rouergue. Rodez, 1797, 3 vol. in-8o, t. III, p 138. Torna al testo ↑

2. Doat 143 et 144. Torna al testo ↑