La Chanson de Sainte Foi d’Agen

Introduction

/XVI/

IV. – Description sommaire et date du manuscrit retrouvé1.

Ce manuscrit – qui porte actuellement la cote: Is. Vossii codex Latinus oct. n.º 60 dans la Bibliothèque de l’Université de Leide, et qui a été acquis par le gouvernement des Pays-Bas, avec la collection d’Isaac Vossius, après la mort de ce célèbre érudit (1689), – compte 29 feuillets de parchemin. Il est formé de deux cahiers, dont le premier comprend 13 feuillets, le second 16. Chaque cahier représente un manuscrit distinct. Le premier, provenant du célèbre monastère de Saint-Benoit-sur-Loire (cf. un ancien ex-libris, inscrit au fol. 13 vo: Hic est liber Sancti Benedicti...), ne nous intéresse pas2. Le second contient, du fol. 14 vo au fol. 23 ro, notre Chanson, transcrite à pleine ligne, sans titre et sans explicit; l’initiale du premier vers (L), pour laquelle une large place, à gauche des cinq premières lignes, avait été réservée, n’a pas été exécutée3. A la suite vient, du fol. 23 vo au fol. 28 ro, sans titre, un long extrait du récit latin de la découverte et de la translation à Vézelai des reliques de sainte Madeleine4.

/XVII/ Bien que, par suite d’un grattage, aucun ex-libris ne nous ren­ seigne expressément sur le premier possesseur du second cahier, il est possible que, comme le premier, ce cahier vienne de Saint-Benoît-sur-Loire. On lit, en effet, en tête du feuillet 14 ro, non seulement la signature: P. Pithou (qui suffit à établir l’identité du manuscrit de Leide et du manuscrit utilisé par Fauchet), mais, immédiatement au-dessous, cette note, écrite par Pithou lui-même: Monsr Daniel me l’a donné a Paris. 1577. Et il est notoire que Pierre Daniel avait recueilli à Orléans quelques épaves de la bibliothèque de Saint-Benoît-sur-Loire, pillée par les Huguenots,

Sur le même feuillet, transformé en feuillet de garde au xvie siècle, et du même côté, entre les lignes 9 et 10, qui sont d’une écriture identique à celle du copiste de notre Chanson1, on lit cette note (écrite, probablement, soit par Daniel, soit par Vossius): Liber ignotæ mihi linguæ. Plus bas, après la fin de la prose, dans l’espace laissé blanc par l’ancien copiste, Pithou a écrit: Ste Foy d’Agen2, et, au-dessous, cette date: 1578. Plus récemment, une main inconnue a utilisé le reste du blanc pour y copier, en forts caractères, le titre d’une édition des Œuvres d’Auzias March3: Les obres del Valen caualler || et elegantissimo poeta Catalan || Ausias March || imprimida en Barcelona en || casa de Claud. Bornal || 1562.

A quelle époque remonte l’écriture de notre texte ? En prenant à la lettre l’expression « il n’y a guieres moins de cinq cens ans », dont se sert Fauchet en 1581, on obtient la date de 1081. Et telle est encore la vérité, ou peu s’en faut, dans l’état actuel de nos connaissances paléographiques.

Mon confrère Henri Omont, conservateur du département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale, dont le jugement fait /XVIII/ autorité, estime que le manuscrit a dû être exécuté entre 1030 et 1070. Mais il faut renoncer à demander à la paléographie un critère pour localiser rigoureusement l’écriture: les traits qu’on y pourrait relever se retrouvent à peu prés partout dans les différentes régions de la France méridionale à la date envisagée.

[Note a pag. XVI]

1. Pour plus de détails, voir la Noticia citée de Leite de Vasconcellos. – Je tiens à exprimer mes remerciements à M. le Conservateur de la Bibliothèque de Leide, qui a bien voulu autoriser le prêt de ce manucrit à la Bibl. nat. de Paris, en novembre 1924, pour m’en faciliter l’étude. Torna al testo ↑

2. Il contient un Liber monstrorum connu, dont s’est occupé en dernier lien, sans mentionner le ms. de Leide, E. Faral (Romania, XLIII, 179 et s.). J’en ai fait une étude spéciale, qui paraîtra prochainement dans le Bulletin Du Cange. Torna al testo ↑

3. Voir l’excellente phototypie des fol. 14 vo et 15 ro (dimensions de l’original) qui accompagne l’édition de Leite de Vasconcellos. Elle a été faite sur un cliché d’É. Châtelain, à qui j’exprime ma profonde reconnaissance pour avoir mis à ma disposition la totalité de ses clichés et facilité ainsi la reproduction réduite qui est placée en face du texte dans la présente édition. Torna al testo ↑

4. Cf. P. Meyer dans Romania, VII, 235, et Girart de Roussillon Introd., p. xxviii. Cet extrait comprend 180 lignes, divisées en para­graphes (le premier numéroté: viii); il débute par: In dextro quippe latere, ce qui correspond à Porto in dextro latere de l’édition donnée par l’abbé Faillon dans ses Monuments inédits... (Paris, 1848), t. I, col. 748 A. Cf. la Bibl. hagiogr. latina des Bollandistes, p. 808, art. Maria Magdalena, 9, Translatio II. Torna al testo ↑

[Note a pag. XVII]

1. Il y a en tout 12 lignes, publiées intégralement par J. Leite de Vasconcellos (Noticia, p. 12), où, à la suite d’un fragment de l’évangile de Saint Luc, est copié un fragment de prose rythmique qui débute par Itinera linquentes morti proxima. Torna al testo ↑

2. Il avait écrit d’abord Agenes, puis il a barré les deux dernières lettres. Torna al testo ↑

3. De là vient l’indication erronée du Catalogus de la Bibliothèque de Leide que nous avons citée plus haut, p. xiv, fin de la note 7 de la p. xiii. Torna al testo ↑