La Chanson de Sainte Foi d’Agen

Introduction

Langue du poème

B. – Traits dialectaux

/XXIX/

II – Dans la morphologie.

1. – 1re pers. sing. ind. prés. de aver – La 1re pers. sing. ind. prés. de aver est représentée par ei, soit que le verbe ait son sens plein (ei 234), soit qu’il serve à former le futur (cantarei 33, dizer vus ei 110, farei 254, pregarei 275, tenrei 264); il y a cependant une exception, où le son primitif régulier ai est conservé (prometrai 176). Saber est assimilé à aver par analogie (sei 232). Je ne saurais préciser la cause de cet affaiblissement de ai en ei, dont d’autres textes provençaux offrent des exemples, et dont la présence dans notre Chanson doit être prise en considération pour déterminer la patrie de l’auteur; mais je la crois d’ordre morphologique, étant donné qu’elle ne procède pas de l’évolution phonétique normale. Il faut remarquer, en effet, que notre texte ne connaît que le son primitif ai dans aiz ou aitz [lat. vulg. *ajaces, pour adjacens], baille [lat. bajulum], mais [lat. magis] et plai ou plaid [lat. vulg. *plagitum, pour placitum]1; par conséquent, il devrait offrir exclusivement ai pour cette personne du verbe aver (qu’on s’accorde à faire remonter au latin vulgaire *hajo, succédané du latin classique habeo), si la phonétique pure était en jeu.

2. – 3e pers. plurl – A la 3e pers. plur. des verbes, la désinence latine -ant, à quelque temps qu’elle appartienne, est toujours rendue par -an: ind. prés. (ausan, etc.), imparf. (eran, laissavan, etc.) et, par suite, condit. prés. (farian), plus-que-parf. en fonction de cond. passé (breugeran, valgran), subj. prés, (aucidan). En tout 24 exemples. Les désinences latines -ent et -unt, unifiées au profit de la dernière, sont rendues indif- /XXX/ féremment par -on ou -un1, à tous les temps: ind. prés. (audun, corron et corrun, etc.), prêt, (esteron, feiron et feirun, etc.), subj. prés, (annun [de annar] 516), plus-que-parf. employé comme imparf. (fosson). En tout 60 exemples, en y comprenant 4 cas où n tombe devant consonne enclitique (cubergrol, meirols, menerols, soll).

L’indic. prés. de aver flotte entre aun, an et ant; celui de far entre fan et fant.

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[Note a pag. XXIX]

1. Je n’invoque ni aia 165 (car on conçoit qu’il puisse y avoir un développement phonétique différent poux *hajo et pour *haja; cf. la forme constante -eira [lat. -aria ou -eria] à côté de la forme dominante -er [lat. -arium ou -erium]), ni laid 166 (car c’est un mot d’origine germanique, donc entré beaucoup plus tard dans le vocabulaire), ni les nombreux mots latins où la diphtongue ai doit son second élément à la vocalisation d’un c primitif, comme faitz [de factos], lai [de illac], etc. (car ce phénomène est plus tardif encore). Torna al testo ↑

[Note a pag. XXX]

1. Le scribe écrit une fois sunt [lat. sunt] contre cinq fois sun et trois fois son. Torna al testo ↑