Bouillet Servières
Sainte Foy
Vierge et Martyre

Livre des Miracles de Sainte Foy
Livre Troisième

/545/ Latino →

XVII.

Comment Siger, qui s’était rendu coupable d’injustes attaques contre sainte Foy, périt misérablement.

Tandis que nous nous appliquons à réunir avec le plus grand soin dans ce recueil tant de récits, venus de toutes les directions, voici qu’un autre miracle frappe au seuil de notre livre. Nous ne saurions lui en refuser l’entrée.

Un chevalier, nommé Siger, habitait le château de Conques (1). Fier de son illustre origine et de sa valeur dans les combats, il ternissait cependant l’honneur de son rang par son hostilité envers sainte Foy. Gonflé d’un fol orgueil et dominé par une cupidité insatiable, il ne manquait aucune occasion d’usurper les biens de la sainte, d’insulter cruellement ses moines, de frapper et de mutiler ses serviteurs. Fréquemment repris avec douceur par les supérieurs du monastère, il justifiait cet oracle de la Sagesse: « La parole ne corrige jamais l’insensé (2) ». Il ne se désistait donc nullement dé ses œuvres perverses. Les pères de la communauté, impuissants à s’opposer à ses sacrilèges entreprises, recourent par des prières assidues à leur sainte patronne et la supplient instamment de les délivrer de cet intolérable fléau. Bien plus, retirant de sa douille l’étendard de la croix du Seigneur, ils exposent sur la place publique la croix (3) avec les châsses et la statue de la sainte martyre, et exhortent l’assemblée des fidèles à obtenir de la justice de Dieu, par l’intercession de sainte Foy, le châtiment de cet odieux tyran et la préservation de l’héritage du Seigneur contre la fureur de ce monstre.

A la suite de ces supplications, le misérable, frappé d’un mal affreux et mortel, fut livré aux châtiments de l’enfer. Mais il est écrit que la postérité de l’impie périra (4), comme il arriva à Sodome et à Gomorrhe (5) que la justice divine anéantit jusqu’aux fondements, ne faisant pas même grâce à un seul de leurs rejetons, de peur que sa race ne souillât la terre des iniquités de ses pères. Trois des fils de Siger le suivirent de près dans la tombe; le quatrième, frappé de paralysie, mourut misérablement peu après; nul d’entre eux ne laissa de postérité. De leurs trois sœurs qui leur survécurent peu de temps, la première, victime de la fureur jalouse de son mari, qui l’avait abandonnée, tomba paralysée et périt dans la plus profonde misère; la seconde, frappée avec ses enfants de la lèpre de l’éléphantiasis, succomba dans de cruelles douleurs; la troisième ne put pas même hériter des biens paternels, car, ayant suivi un serviteur qui l’avait séduite, elle fut déchue de son rang. La tour elle-même, confidente des desseins sacrilèges de cette race maudite, fut renversée de fond en comble par un vent d’une extrême violence et s’écroula avec un effroyable /546/ fracas. C’est ainsi que la puissante sainte sut briser un insolent orgueil et anéantir une race funeste. C’est ainsi que la justice divine délivra le saint lieu des invasions de cette famille sacrilège.

[Note a pag. 545]

(1) Ce château était situé sur un roc isolé qui se dresse au milieu du faubourg de Conques, au confluent de l’Ouche et du Dourdou. Il n’en reste que quelques ruines. On voit encore en ce lieu une petite chapelle, dédiée aujourd’hui à Notre-Dame de la Salette; c’était la chapelle du château, sous le vocable de Notre-Dame. (Cartul. nº 558.) – Cf. chap. iv et V du présent livre. Torna al testo ↑

(2) Prov. xviii, 12. Torna al testo ↑

(3) Une telle exposition indique que cette croix renfermait une relique de la vraie croix. Torna al testo ↑

(4) Ps. xxxvi, 28. Torna al testo ↑

(5) Cf. Is. i, 9. Torna al testo ↑