Bouillet Servières
Sainte Foy
Vierge et Martyre

Livre des Miracles de Sainte Foy
Livre Premier

/466/ Latino →

X.

Du châtiment dont le ciel frappa celui qui avait attaqué les pèlerins de sainte Foy.

À la même époque, durant mon séjour dans le monastère, il se produisit un prodige des plus terrifiants. Je ne l’ai point vu moi-même, bien que j’eusse pu en être témoin. Mais celui qui l’a vu me l’a raconté en public et m’en a garanti la vérité sous la foi du serment. Je proteste ici que, tant que Dieu me conservera ma saine raison, jamais je ne souillerai sciemment ces pages de la moindre inexactitude. Dieu n’aime pas les vains discours, et il abhorre les louanges qui lui viendraient du mensonge. Au surplus, je ne reçois ni n’espère aucun profit de cette œuvre. Je ne recherche que la protection de sainte Foy dans les épreuves de ma vie.

Un chevalier du Limousin, nommé Gérard, avait accompli avec grande dévotion le pèlerinage de Sainte-Foy. Or son ennemi, nommé Gérald, guetta son retour et se porta à sa rencontre, à la tête de quinze hommes d’armes. Infidèle au respect qu’il devait à Dieu et à la sainte dont l’objet de ses embûches était le pèlerin, il l’attaqua dans la chaumière d’un paysan où celui-ci avait trouvé l’hospitalité. Le pèlerin, se voyant entouré d’ennemis, implora le secours d’en haut, dans l’anxiété de son âme, car il n’avait avec lui d’autre personne de sa suite qu’un seul serviteur. A ce moment, terrifiés par je ne sais quel fracas miraculeux, les soldats qui entouraient la maison s’enfuirent précipitamment, laissant seulement un des leurs au siège de la chaumière. Gérard, enfermé dans l’intérieur, n’attendait que la mort. Cependant, animé /467/ de l’esprit qui poussa Moïse contre l’Egyptien et Samson contre les Philistins, il saisit la hache du paysan, s’élance au dehors avec impétuosité, tue d’un coup l’un des assaillants, fait prisonnier l’autre qui était le chef, Gérald, l’enchaîne et l’emmène dans son château.

Quel fut dans la suite le sort du prisonnier? Nul n’a su me le dire. Le hameau que l’on désigne comme ayant été le théâtre de cet événement s’appelle Sulpiac: il est à trente milles de Conques. C’est ainsi que ce traître, ennemi de Dieu, « tomba dans l’embûche qu’il ne voyait pas et fut pris dans le piège qu’il avait lui-même posé perfidement (1) »: le coupable fut saisi dans le filet qu’il avait tendu contre l’ennemi.

[Nota a pag. 467]

(1) Ps. xxxiv, 8. Torna al testo ↑