Bouillet Servières
Sainte Foy
Vierge et Martyre

Livre des Miracles de Sainte Foy
Livre Premier

/484/ Latino →

XXV.

Du gardien Gerbert; comment il fut forcé de restituer l’or de sainte Foy.

Je ne dois pas négliger non plus de rapporter ce qui arriva à un jeune homme, nommé Gerbert, qui fut plus tard serviteur de l’église.

/485/ Passant un jour devant l’atelier où là table d’or avait été confectionnée, il trouva par hasard, parmi les scories rejetées par le fourneau, un fragment de terre glaise dans lequel les orfèvres avaient fondu de l’or. La violence du feu ayant soulevé ce tesson, avait produit une boursouflure dans le fond; une parcelle du précieux métal avait coulé dans cette cavité et y était restée cachée. Le jeune homme, ayant vu briller une paillette d’or dont l’extrémité sortait au dehors, se douta que le têt devait receler un fragment de métal; il s’approche pour s’en assurer, brise le tesson et découvre dans la cavité un globule d’or fin, du poids exact de neuf deniers et une obole. Gerbert, qui n’avait jamais eu d’or en sa possession, fit éclater une joie extrême et confia sa trouvaille à un de ses amis, pour la receler. Quelques jours après, il tomba malade et se coucha, et l’un de ses yeux fut atteint d’une violente douleur. Sainte Foy lui apparut en songe, non cette fois sous la forme d’une jeune vierge, mais, contre sa coutume, sous la forme de la vénérable statue, lui demanda avec sévérité l’or qu’il avait caché, et se retira d’un air courroucé. La nuit suivante, elle lui apparut sous le même aspect et se retira avec le même air menaçant, mais après lui avoir fait promettre de rendre l’or dès le lendemain. Lé jeune homme s’étant néanmoins obstiné dans sa résistance, la même vision lui apparut encore pour la troisième fois, mais avec une expression bien plus terrible:

“Réponds, infâme voleur, lui dit-elle, pourquoi ne me rends-tu pas mon or que je re redemande si souvent? »

En lui adressant ces paroles de réprimande, elle dirige vers lui la pointe d’une baguette de coudrier qu’elle portait à la main, visant l’œil endolori, comme pour le blesser. Gerbert, pour éviter le coup, balançait la tête avec rapidité et ne cessait de crier de toutes ses forces en demandant grâce. Cet homme cupide fut frappé d’une telle terreur, que le lendemain il rapporta l’or et l’offrit à Dieu et à sainte Foy. Jamais dans la suite, ainsi qu’il me l’a raconté lui-même, il n’éprouva plus d’atteinte de son mal.