Bouillet Servières
Sainte Foy
Vierge et Martyre

Livre des Miracles de Sainte Foy
Livre Deuxième

/517/ Latino →

VIII.

Ce qui advint à l’abbé Pierre, sur le chemin de Rome.

A cette époque et l’année même où l’on m’avait fait, à Conques, toutes ces relations (1), je revenais de Rome. Or il se rencontra que cet abbé Pierre revenait du même pèlerinage, escorté, selon sa coutume, d’une nombreuse suite de gentilshommes, ses vassaux, montés sur de magnifiques mulets harnachés avec un luxe royal. Je poursuivais ma route à la suite de mes compagnons, lorsqu’il me joignit et me demanda d’où j’étais. Avec la réserve d’un étranger s’abouchant avec un étranger, je me bornai à répondre que j’étais de l’Anjou. Charmé pourtant de la société de ces Aquitains, je chevauchai en leur compagnie et m’entretins avec eux.

/518/ Pierre avait une chevelure blonde; il était de taille moyenne, large d’épaules; les contours de ses membres révélaient la noblesse de sa naissance. Suivant la mode inculte de son pays où souvent les clercs eux-mêmes, bien que se piquant de régularité et se rasant la tête, portent la barbe, il avait une longue barbe. C’est pourquoi je ne le reconnus pas pour un clerc.

Ayant remarqué quelque culture dans ma conversation, il s’entretint avec moi avec beaucoup de science et de distinction. Je lui demandai alors s’il était clerc; il me répondit qu’il était même abbé. Tel était en effet le titre qu’on lui donnait, bien qu’il ne fût pas le supérieur des moines; mais il était à la tête de plusieurs monastères (1). Il ajouta qu’il s’appelait Pierre. A ce nom, la pensée me vint qu’il était peut-être celui dont on m’avait parlé à Conques. Nous nous fîmes alors mieux connaître l’un à l’autre, et, par suite de l’accord de nos sentiments, nous nous félicitâmes mutuellement de notre rencontre. Dans cette occasion, il me fit une relation, mieux attestée encore, du miracle précédent, raconté par d’autres. Puis il ajouta le récit du miracle suivant, digue d’être rapporté.

[Note a pag. 517]

(1) L’an 1020. Torna al testo ↑

[Note a pag. 518]

(1) C’étaient évidemment des prieurés et non des abbayes proprement dites. Torna al testo ↑