Bouillet Servières
Sainte Foy
Vierge et Martyre

Livre des Miracles de Sainte Foy
Livre Troisième

/547/ Latino →

XIX.

D’un pèlerin qui fut délivré par sainte Foy des mains des Sarrasins.

Le fait suivant, dont on nous a communiqué le récit et qui est l’œuvre d’une admirable disposition de la toute-puissance divine, mérite de trouver place dans ce livre.

Le serviteur d’un chevalier nommé Raymond, avait accompli avec grande ferveur le pèlerinage du Saint-Sépulcre. Au retour de sa première visite, il tomba entre les mains de pasteurs Sarrasins, qui l’accablèrent de coups et de mauvais traitements, et exigèrent pour sa rançon plusieurs talents d’or. Comme il ne pouvait leur donner cette somme, ils le tourmentèrent cruellement, le dépouillèrent de tous ses vêtements et le flagellèrent. Puis ces païens allument un grand feu et y jettent les ceintures du pèlerin, afin de les réduire en cendres et d’en retirer l’or qu’ils y croyaient caché. Le malheureux, se voyant entre les mains de ces bourreaux impitoyables, invoque avec des cris lamentables la protection de sainte Foy et lui confie son triste sort.

« O sainte Foy, s’écriait-il, illustre vierge et martyre, jusqu’ici j’ai toujours éprouvé l’heureux effet de votre protection. Bien souvent vous m’avez préservé de la faim, de toutes sortes de dangers et des plus terribles tempêtes. Mettez le comble, je vous en supplie, à tant de bonté, et délivrez-moi des mains cruelles de ces païens. »

Tandis qu’il répandait ainsi ses larmes et ses prières, les flammes du foyer, s’êlevant en forme de cercle au-dessus des ceintures de cuir, les entourèrent de leurs replis, sans les atteindre et sans leur nuire. Les stupides bergers, après avoir applaudi avec admiration à ce spectacle merveilleux et s’être livrés aux démonstrations d’une joie enfantine, attribuèrent ce phénomène, non à la puissance de Dieu, mais à quelque cause fortuite et inconnue. Puis, satisfaits et apaisés, ils abandonnèrent le pèlerin et coururent rejoindre leurs troupeaux sur la montagne. Celui-ci, transporté de joie et de reconnaissance envers Dieu et envers sa libératrice, reprit ses vêtements et, continuant sa route, arriva heureusement au terme de son voyage.