Bouillet Servières
Sainte Foy
Vierge et Martyre

Livre des Miracles de Sainte Foy

/594/ Latino →

Supplément

2º Récits spéciaux au manuscrit de la reine de Suède (2)

I.

D’un paysan délivré du démon.

En approchant du terme de nos récits, nous devons opposer un dédain absolu à l’esprit de dénigrement de notre siècle dégénéré, car notre cœur s’appuie avec fermeté sur cette parole divine: « A moi la vengeance et le châtiment (3) ». Quel est l’homme de foi qui pourrait s’empêcher de célébrer les louanges d’une vierge si illustre et les merveilles que le Christ daigne opérer à nos yeux par ses mérites? Les œuvres que le Seigneur ne craint point d’exécuter, le serviteur ne doit pas rougir de les publier et même de les imiter. Il convient donc de présenter, même à une génération rebelle, les récits qu’il nous reste à consigner dans cet écrit.

/595/ Un paysan était possédé du démon. Son nom échappe à ma mémoire; la multitude des miracles de la sainte et le manque d’écrivains pour les recueillir sont la cause de l’oubli où s’ensevelissent bien des choses dignes d’occuper l’attention. Ce malheureux se livrait de tous côtés à de furieux emportements; il s’exposait à la mort en courant comme un insensé à travers les sommets bordés de précipices. Bien des fois même il s’était précipité du haut de roches escarpées jusqu’au fond d’abîmes affreux où il devait être écrasé. Hélas! quelle tyrannie cet ennemi du genre humain exerce sur les hommes! Tandis qu’il flatte l’imprudence des pervers, il séduit les bons et les expose au danger d’une mort éternelle.

L’infortuné possédé, après avoir ainsi été agité longtemps par ces foreurs insensées, après avoir été conduit sans succès à plusieurs saints pèlerinages, fut enfin amené à Conques, les bras fortement enchaînés. Il faut observer que ce n’est pas toujours le mobile de la religion, mais souvent le mouvement de la dévotion populaire, qui entraîne aux pieds de la vierge sainte Foy les fidèles attirés par ses miracles. Lorsque le possédé fut arrivé en ce lieu, on essaya plusieurs fois de le relâcher et de lui ôter les liens. Mais aussitôt il courait se jeter dans les horribles précipices qui bordent le Dourdou. On désespérait de sa guérison, lorsque, sur l’avis de sa mère, on s’avisa d’offrir à la sainte un vil animal, un âne. Aussitôt l’infernal envahisseur fut chassé, et le possédé se trouva parfaitement guéri.

Admirez ce qu’il advint de là. C’est par le don d’un animal digne de mépris que fut chassée; une bête mille fois plus méprisable.

[Note a pag. 594]

(2) Voir plus haut, p. 428. Torna al testo ↑

(3) Hébr. x, 30. Torna al testo ↑